25 févr. 2015

La légende de l'Abyssa - Claire Porquet

En l’espace de quelques jours seulement après le début du mois de janvier, j’ai réussi à faire une entorse à une de mes résolutions : ne plus acheter de nouveaux livres tant que je n’ai pas lu ceux que j’ai déjà et que je contemple…
Pour me donner bonne conscience quand je me suis offert celui-ci, je me suis efforcée de me rappeler que lors de mes recherches à Grand-Bassam, quelques rares personnes l’avaient mentionné durant des interviews…
C’était donc pour la bonne cause que je cédais, pour la recherche… Et je n’ai pas regretté bien que mon avis soit partagé…

La part de l’auteure pour sa communauté

Dès les premières pages, le ton est donné. La préface est signée « Sa Majesté Awoulae Amon Tanoe roi des N’zima Kotoko de Côte d’Ivoire, Grand-Bassam » p.10 puis dans son avant-propos l’auteure nous parle de l’urgence d’un retour aux sources afin de ralentir l’avènement de nouvelles échelles de valeurs qui semblent nous pousser à des comportements inquiétants. Toujours selon l’auteure la fête de l’Abissa qui est un « festival de réjouissances populaires à caractères mystiques »p12, permet aux peuples N’Zima Kotoko de faire la promotion de ses us et coutumes, et l’enracinement dans sa propre culture par de telles manifestations par exemple serait le « gage d’un meilleur apprentissage des valeurs occidentales ». Puis elle nous invite à apprécier les richesses de ce peuple dont elle nous parlera à travers son histoire.
J’ai donc, dès le début eu le sentiment que ce livre était en quelque sorte la contribution de l’auteure à une meilleure connaissance d’une importante tradition de son peuple et surtout à sa promotion.

Une histoire à visée pédagogique

Dans la légende de l’Abyssa, cette tradition N’zima nous est racontée sous deux formes : une épique et une autre plus ‘réelle’, descriptive, car les personnages principaux iront assister à la fête et l’auteure nous rapporte les évènements dont ils sont témoins.

Dans la forme épique, tante N’dèdè de Grand-Bassam est accueillie par sa sœur Akouba à Abidjan. À l’occasion de son arrivée, Gnakou Bilé, le mari d’Akouba invite les voisins pour une soirée spéciale durant laquelle ils écouteront la légende de l’Abyssa racontée par cette « agréable conteuse ». Kodjo et Echua les enfants de Bilé et Akouba attendent ce moment avec impatience. L’arrivée des invités est une véritable libération. Tout le monde s’installe et tante Akouba commence l’histoire.
Elle nous raconte donc le mythe de la naissance de l’Abissa. Toutefois cette version diffère un peu de ce que j’ai pu entendre durant mes recherches. L’auteure semble avoir ajouté de nombreux éléments à la légende pour tenir le jeune lecteur en haleine, mais surtout pour tenter d’expliquer et de comprendre d’où viennent certaines pratiques que l’on retrouve encore dans nos villages aujourd’hui.

Toutefois, certaines scènes décrites avec une remarquable précision semblent relever de la réalité. En les parcourant, pendant quelques secondes, je me suis revue à Bassam en train d’assister à ce type d’évènement. J’en ai déduit que l’auteure les avait sûrement vécues… Mais ce n’est pas le sujet.

Les chapitres ‘ le voyage à Grand-Bassam’ mais surtout la ‘conférence’ me font affirmer également avec certitude que l’auteure à assister à la conférence dont elle parle et ce d’autant plus que le professeur Agbroffi et Mr Louis Kouamé Abrima, sont des personnes qui existent bel et bien. 

Ainsi, nous quittons la fiction pour être dans un genre un peu plus journalistique. En effet, l’auteure détaillera le déroulement de la conférence à savoir, l’arrivée des invités, les propos tenus par le Pr Agbroffi et Monsieur Abrima. Cette partie me semble un peu rébarbative pour de jeunes enfants, car il s’agit d’une succession d’informations sur le peuple N’zima mises bout à bout, sans véritable structure ou ‘simplification’ pour maintenir l’intérêt des enfants...






Une allure de reportage

Enfin dans la dernière partie, l’Abissa nous est racontée sous sa dernière forme, ou devrai-je plutôt dire rapportée. En effet, tante N’dèdè s’est rendue à Bassam avec Kodjo et Echua. Ils retrouvent leurs cousins avec lesquelles ils vont assister pour la première fois à l’Abissa, durant une semaine entière. L’auteure nous racontera chacune des journées et leurs lots d’évènements, accompagné d’explications. Elle en profite pour rendre hommage à quelque membre de la communauté N’zima qu’elle semble connaître.

Dans cette partie, les enfants iront à la découverte de la ville elle-même. J’ai bien aimé le fait qu’au-delà de l’Abissa l’auteure nous parle brièvement des monuments et bâtiments de la ville. Je pense qu’il est important d’en parler pour que tout le monde puisse en apprendre davantage sur les différentes richesses et facettes de Grand-Bassam. Toutefois, la façon par laquelle l’auteure suscitera un intérêt pour la découverte des bâtiments chez les enfants m'a fortement déplu. 

Le dernier chapitre est de loin, le meilleur de tous. J’avais le sentiment d’être en train d’assister à la fête et les anecdotes rapportées m’ont rappelée quelques moments forts que j’ai moi-même vécu durant l’Abissa. 

Dans l’ensemble c’est un livre intéressant qui permettra aux enfants de découvrir une culture, une pratique actuelle et par la même occasion d'enrichir leur vocabulaire. Les illustrations qui émaillent le récit permettront à ceux qui n’ont jamais assisté à l’Abissa, d’avoir un petit aperçu des moments forts de la célébration.

Et pour ceux qui souhaitent en savoir davantage sur l'Abissa, voici un article publié sur ce blog à ce sujet : L'Abissa 2014


Claire Porquet, la légende de l'Abyssa
NEI/CEDA

3 févr. 2015

Debout-payé - Gauz


Une chose dont je suis certaine : après avoir lu ce bouquin, je ne regarderai certainement plus les vigiles de la même façon. Je me demanderai souvent si un Gauz se cache en eux. Ou pire vous me direz, je les ‘verrai’ peut-être un peu plus.

Dans Debout-payé, celui qui s’est rebaptisé Gauz nous parle d’Ossiri, vigile ivoirien vivant en France, plus précisément à Paris. À travers lui, c’est toute l’histoire de la profession, du processus de recrutement en passant par les ‘circuits’ d’embauche, le jargon ou encore son évolution qui nous sera racontée.


 Les vigiles, ce sont ces ‘invisibles’ qui sont pourtant partout. Ici, sous nos tropiques, à Abidjan notamment, ils sont souvent habillés en t-shirt jaune, estampillé du nom de la société de gardiennage qui les emploie. En tout cas, pour les plus visibles d’entre eux. On les aperçoit, le plus  souvent assis à l’entrée des entreprises qui les emploient. Lorsqu’une personne, un client ou un employé arrive, ils se lèvent pour leur ouvrir la porte. On les aperçoit également à travers les guérites des villas cossues de la ville, où  ils sont également assis la plupart du temps, voire couchés en train de somnoler jusqu’à ce qu’une sonnerie retentisse et qu’ils soient obligés de se lever péniblement pour vérifier l’identité de celui qui souhaite entrer.


 En France, à Paris, le métier de vigile est tout autre. On les retrouve principalement dans des magasins, les grands magasins surtout. La façon de se vêtir dépend de l'enseigne où on travaille, selon qu’elle soit huppée ou un peu moins. Et puis en France, bien souvent, les Africains qui se retrouvent à exercer ce type de métier le doivent à leur réseau, l'urgence de trouver rapidement ‘quelque chose’ pour (sur)vivre ou encore au problème d’équivalence que posent leurs diplômes obtenus à l’étranger. Et oui!

Mais une chose est certaine, les vigiles de France, à l’inverse de ceux d’ici, ont une chose en commun : ce sont des Debout-payé autrement dit ceux qui sont payés pour rester debout.

Ainsi, dans Debout-payé la ‘condition de vigile’ en France est dévoilée.




C’est à travers la vie d’Ossiri, jeune ivoirien instruit, avec une situation stable en Côte d’Ivoire qui décidera pourtant d’aller ‘se chercher’ en France que Gauz nous entrainera dans le quotidien de ces invisibles. Ossiri se liera d’amitié avec le jeune Kassoum, lui aussi ivoirien et sans papiers, tout droit sorti du Colosse de Treichville, un ghetto d’Abidjan. Ils se retrouveront à faire le même métier de vigile.


Les chapitres racontant la vie d’Ossiri, ponctués d’incroyables digressions, sont souvent suivis de chapitres d’interludes aux titres savoureux dans lesquelles l’auteur nous raconte des anecdotes, analyses, questionnements, résultats des nombreuses heures que l’auteur a lui-même passé debout, alors qu’il était vigile. Le récit change alors de rythme, de type de narration. J'avais du mal au début avec les premiers chapitres d’interludes, car j'avais hâte de ‘rencontrer’ les personnages, connaître leur histoire. Mais j'ai fini par m'habituer à ces petites interruptions dans la narration pour apprécier la répartie et l’humour de l’auteur. Rien ni personne n’est épargné. On rigole. On s’arrête. On relit pour s’assurer qu’il a vraiment écrit cela. On appelle un proche qui sera réceptif pour lui en lire un passage. Ces chapitres d’interludes s’y prêtaient particulièrement bien.


Grâce à Ossiri, on découvre aussi un autre Paris. Le Paris africain à travers les yeux de ses sans-papiers, ses ‘étudiants’, leurs revendications et l’évolution’ de leur situation depuis les années 1960. L’auteur revisite de ‘grands évènements’ à travers le prisme de ses ‘invisibles’ de France pour nous offrir une histoire selon leur perspective. On voit comment changements politiques, bouleversement des perceptions à la suite d’évènements retentissants sur l’ensemble de la planète peuvent affecter leur quotidien en créant entre autres un sentiment d’insécurité plus important et une grande fébrilité dans les milieux que fréquentent ces personnes.


Au-delà de son style truculent, son humour percutant, sa capacité à revisiter certains adages, je retiens également les nombreuses ‘ivoirisations’ du langage. Je me suis sentie proche de l’auteur, car je comprends ses expressions, ses termes, ce qu'il insinue et surtout saisir de ‘petites choses’ qui parlent vraiment aux ivoiriens. Je dois dire que retrouver de telles références dans ce roman particulièrement intéressant, ont rendu sa lecture encore plus agréable.


Il y a tellement de choses à dire encore sur l'histoire, les personnages notamment la mère d’Ossiri, une véritable afrocentriste et les interrogations importantes que ses propos peuvent induire chez le lecteur ou encore les invitations à l'ouverture d’esprit et à la curiosité … mais je vais m’arrêter là.


 Finalement comme l’a si bien dit Ossiri à Kassoum :



 « Kassoum, juste parce que tu es là, tu es un homme meilleur. Meilleur que les gens du Colosse parce qu'ils ne connaîtront jamais Paris. Meilleur que les gens de Paris parce qu'ils ne connaîtront jamais le Colosse». p154

 J'ai envie de dire que Gauz est meilleur que nous, pas parce qu’il a connu Paris, Abidjan et je ne sais encore quel autre endroit, mais plutôt parce qu'il a su savamment, avec ingéniosité et humour, concilier ses  deux horizons, ses deux mondes et ses deux cultures pour nous offrir ce magnifique roman qui décrypte la société française, la société de consommation, à travers le regard affuté d'un ‘Debout-payé’ ivoirien.


Un roman audacieux, instructif. Un pari qui semble réussi pour l’auteur qui vient de se voir décerner le prix du meilleur premier roman français 2014 et le Prix des libraires Gibert Joseph 2014.

Le nouvel Attila
Meilleur premier roman français 2014
Prix des libraires Gibert Joseph 2014

19 janv. 2015

Loin de mon père - Véronique Tadjo

Je connais Véronique Tadjo depuis toute petite grâce à ses histoires pour enfant. Depuis peu, je découvre une autre facette de cette auteure, à travers ses romans. Le premier d’entre eux que j’ai lu était Champs de bataille et d’amour . Et récemment, un ami m’a prêté celui-ci. Bien que je ne connaisse pas l’ensemble de l’œuvre de l’auteur, je dois dire que j’ai déjà le sentiment de connaître ses sujets de prédilection. Du moins, des sujets qui la passionnent car bien que Champs de Bataille et d’amour (2006) et Loin de père(2010) nous parlent de sujets différents, j’y ai retrouvé des thèmes similaires : la question des couples mixtes et celle de pays en proie à de profondes déchirures.

Dans Loin de mon père, Véronique Tadjo nous raconte le retour de Nina dans son pays natal pour une funèbre occasion : le décès de son père, le célèbre docteur Kouadio Yao. La jeune femme n’était pas retournée en Côte d’Ivoire depuis de nombreuses années en raison des crises sociopolitiques qui avaient secoué le pays. Et puis… elle avait continué sa vie ailleurs, en France, son autre pays car elle est franco-ivoirienne. Bien que semblant déconnectée des réalités de son pays, Nina va devoir participer à l'organisation des funérailles.


Photo prise par Armand Pockpa, auteur du blog : http://monsieurpockpa.blogspot.com/


L’auteure va donc nous entrainer sur les pas de Nina et l’organisation des funérailles dans son pays d’origine.  Entre lenteur et pressions familiales pour que les choses se déroulent selon les habitudes de la Côte-d’Ivoire, la coutume, les croyances et le statut de son père. Nina, elle, bien qu’ayant grandi dans ce pays semble être dépassée par la situation et ne pas comprendre certaines considérations.Toutefois, ce sont les zones d’ombre laissées par son père et dévoilées au cours de son séjour qui la marqueront à jamais. Révélations et secrets de famille éclatent. Mais combien son père en a-t-il emporté dans la tombe avec lui ? Ainsi, au-delà de la perte de son père et de son retour dans un pays encore instable créant un sentiment d’insécurité permanent; ce sont surtout les découvertes qui affecteront la jeune femme. Nina ne sera plus jamais la même. Elle avait gardé une certaine image de son pays, de sa ville natale et de son père qui n’était en fait qu’illusions… Bien qu’étant entouré des siens, elle finira par sentir une pesante solitude, une impression de trahison qui la poussera à se poser des questions sur tous les membres de sa famille : oncles, tantes, mais surtout sur sa mère et la relation qu’elle avait avec son père et sur sa grande sœur Gabrielle qui brille par son absence… Mon personnage préféré, je crois, pour sa franchise, son courage et sa capacité de s’affranchir du poids de certains supposés devoirs et d’éventuels remords. Une femme qui a confiance en elle. C’est un personnage que je ne comprenais pas au départ, mais que j’ai fini par adorer. 

Bien qu’ayant passé pratiquement 243 pages en compagnie de Nina, j’ai l’impression de ne pas la connaître. Le style laconique de l’auteure m’a laissée sur ma faim, car j’ai le sentiment de ne pas avoir pu être entrainée par l’histoire et surtout de ne connaître et comprendre les personnages que très superficiellement. J’ai souvent eu l’impression que Nina était incomprise et qu’elle avait le sentiment qu’une des raisons principales à cela était sa couleur de peau, son métissage.  
« Être métisse, est-ce avoir la bonne ou la mauvaise couleur»? p171
« Toute ma vie, j’ai louvoyé, négocié, feinté. J’ai caressé dans le sens du poil, courtisé l’acceptation, attendu la reconnaissance, espéré l’invitation. Toute ma vie, j’ai tenté de faire preuve de bonne volonté, multiplié les efforts pour être entendue…» P172
Pendant ma lecture, je reprochais à Nina de ne pas connaître certaines réalités du pays alors qu’elle y avait bel et bien grandi. J’étais un peu confuse…Toutefois, au terme de son séjour en tant qu’ADULTE en Côte d’Ivoire, elle aura sûrement, désormais, une réponse à cette question qui lui taraudait l’esprit avant son départ :
 «  Qu'est-ce qui fait un pays? » p19
Une question difficile!



Préface d'Emmanuel Dongala
Édition première en France : Actes Sud (2010)
Coédition solidaire "Le livre équitable"
Collection "Terres solidaires"

13 janv. 2015

L'équation africaine - Yasmina Khadra


Avant de commencer ma chronique, je voudrais souhaiter à tous une bonne et heureuse année 2015.
J’espère que vous avez passé de belles fêtes de fin d’année.
En ce qui me concerne, elles étaient particulièrement intenses…

J’ai été accompagnée dans mes pérégrinations par L’équation africaine de Yasmina Khadra.
Je l’ai commencé dans le dernier avion que j’ai pris en 2014, puis terminé dans le premier que j’ai pris en 2015.
Souvent, les quelques personnes qui apercevaient la couverture de mon bouquin me demandaient « Alors, elle écrit bien? ». Je répondais souvent la même chose :
« C’est un homme qui a pris les prénoms de sa femme comme pseudo. Sinon il s’appelle Mohamed… Mohamed Moulessehoul. C’est un auteur algérien qui a écrit beaucoup de livres à succès, dont Ce que le jour doit à la nuit qui a été adapté au cinéma récemment ».
Mes interlocuteurs me répondaient souvent avec un simple « Ah! Ok! ». Je comprenais que je n’avais pas besoin de continuer, ça ne les intéressait pas trop.
De toutes les façons je n'aurais pas pu en rajouter. Bien que je suive, de loin, l'actualité de cet auteur, c'était la première fois que je découvrais un de ses écrits. Le livre m'a été offert par ma soeur. 
Et je dois dire, après l'avoir terminé, que mon avis est mitigé. Il m’arrive souvent de ne pas commenter les livres que je n’ai pas aimés parce que tout simplement je ne sais pas quoi dire, si ce n’est que je ne l’ai pas apprécié. Je ne me ‘force’ pas à m’étaler sur un bouquin qui ne m’a pas touché.
Toutefois celui-ci, est… particulier dans la mesure où je n’ai pas aimé l’histoire, mais alors pas du tout, mais j’ai tout de même été emportée par l’écriture de l’auteur.




 Kurt Kausmann, médecin généraliste vit paisiblement à Frankfurt avec sa femme ou presque… En effet, depuis quelque temps, une nouvelle routine vient de remplacer la précédente. Sa femme n’est plus la même, mais le docteur n’arrive pas à en déterminer la raison. Et puis soudainement, le coup de massue : sa femme meurt.
Kurt se transforme en zombie, il ne comprend pas ce qui s’est passé, ce qui lui a échappé. Il ne cesse de ressasser les derniers jours, les dernières semaines, le dernier moi, mais rien… C’est l’incompréhension totale. Sa vie vient de prendre un autre tournant.
Face à sa peine et ses tourments; son ami Hans Makkenroth, le force presque à l’accompagner dans une expédition humanitaire. Finalement convaincu que ce voyage pourrait l’aider à reprendre sa vie en main, Kurt décide de le suivre.
Pourtant, rien ne se passera comme prévu. Un matin, des pirates accostent leur voilier et les prennent en otage. Ce sera le début d’un long calvaire plein de rebondissements, de surprenantes rencontres et de déchirement. L’issue sera incertaine…

Je n’ai pas aimé l’histoire. Au début, à plusieurs reprises j’ai eu envie de m’arrêter et à la fin également jusqu’à ce qu’un nouveau retournement me convainque de poursuivre.  Toutefois, pendant une grande partie de l’histoire ce qui m’a permis de ‘tenir’ c’est la plume de l’auteur : riche, fascinante, remarquable. Une écriture des extrêmes et des contrastes en fonction des personnes et des évènements avec des rythmes saccadés, lents et parfois une impression d’éternité. La description de quelques scènes poignantes m’a particulièrement marqué…
Je me suis rendu compte que je n’avais jamais exploré ce genre : des histoires de pirates, de terrorisme, de réfugiés. Je ne me dirige jamais vers ce type d’histoire en général et la lecture de celui-ci m’a conforté dans ma position. Mais ce que je n’ai pas apprécié non plus c’est un l'angélisme à outrance dont l'auteur fait preuve en parlant de l'Afrique: l’Afrique mirifique, l’Afrique de gaieté malgré les calamités. Cet angélisme est illustré par un personnage en particulier. Mais dans le fond il s’agissait peut-être de rendre hommage à la capacité de résilience d’un continent, ses habitants… son âme.
Dans cette histoire, certains personnages sont à la fois inhumains et philosophes, puérils et violents, déprimés, mais plein d’espoir ou encore désœuvrés  mais heureux et bien dans leur peau. J’ai été touché par Black-moon, dégoutée et surprise par Baba-Sy, un personnage « délirant » pour reprendre les mots de Bruno, un personnage dont je me souviendrai : « Bruno l’Africain! ».

« Bruno riait de tout, de ses déveines comme de ses exploits… Étrange personnage! Jamais rancune n’aurai égratigné sa foi indéfectible en les hommes. Il ne voyait dans la bêtise de ces derniers qu’une consternante immaturité qui leur infligeait plus de tort qu’ils n’en faisaient. La nuit, pour meubler mes insomnies, je teste plusieurs clés pour accéder à sa mentalité et comprendre comment elle fonctionne, mais la serrure change de combinaison à chacune de mes tentatives. Quel secret a-t-il percé dans ce continent ? Quelle philosophie a-t-il acquise durant ses décennies de transhumance? La réponse, il l’a emporté avec lui. […] … S’il y avait une morale à l’existence, elle se résumerait ainsi : nous ne sommes que des souvenirs»! p297-298

Ce roman est également une tribune pour saluer le travail de tous les volontaires, ces anonymes qui lâchent tout afin d'aider et se donner à l'autre bout du monde, dans des conditions inimaginables parfois. Des personnes qui espèrent simplement pouvoir assister à de « petits miracles » quotidiens et finissent par avoir la capacité de s'émerveiller de simples choses que l'on ne sait plus apprécier lorsqu'on se laisse submerger par la routine et la pression du quotidien.


20 nov. 2014

L'Abissa 2014 !





Cette année, étant en Côte d’Ivoire, principalement à Grand-Bassam pour un peu plus de six mois,  dans le cadre d’un travail de recherche;  il m’était impossible de rater l’Abissa et ce d’autant plus qu’il s’agit d’un évènement qui aura une place importante dans la rédaction de mon mémoire.
Avant qu’elle commence, dans le cadre de mes recherches justement,  j’ai eu la possibilité d’interroger de nombreuses personnes sur ce que l’Abissa représentait pour elles, leur communauté, à savoir les N’zima, et de quoi il s’agissait réellement. En effet, bien qu’elle soit sans cesse présenter comme "une des plus grandes attractions touristiques de Côte d’Ivoire", au-delà de l’aspect festif, carnavalesque; pour les N’zima, l’Abissa revêt un caractère bien plus intime, traditionnel … en tout cas, pour certains d'entre eux !

Depuis mon arrivée et le début de mes différentes séries d’interviews, tout le monde m’en parlait. Certains avec engouement, d’autres avec un peu plus de dédain…
Du chauffeur de taxi, en passant par les différents habitants de la ville ou les personnes qui y travaillent; tout le monde mentionnait spontanément cet évènement, même lorsque je ne l’abordais pas dans mes questions :

 « -Tu as déjà vu l’Abissa ? 
-Non!
 -Quoi tu n’as jamais assisté à l’Abissa ?
 -Heu… non!
 -Ah tu vas voir, c’est formidable! »



                              Je vais donc tenter de vous raconter mon Abissa 2014





Aux origines de l'Abissa 

Avant de m’étaler un peu sur l’Abissa; il me semple indispensable de commencer par une très brève présentation du peuple N’zima kôtôkô. Il s’agit d’un sous-groupe du grand groupe des Akans. On les retrouve principalement sur la côte Est de la Côte d’Ivoire et la Côte Ouest du Ghana. Il s’agit d’une société matrilinéaire composé de sept matri-clans ou familles qui sont les suivantes : les Nvavilé, les Ndjuaffo, les Allohomba, les Adahonlin, les Ezohilé, les Mafolé et les Azanhoulé.

Selon la tradition orale N’zima, l’Abissa appartiendrait à l’une de ces sept familles, celle des Nvavilé. En effet, un jeune Nvavilé, qui allait chasser dans la forêt giboyeuse de l’époque, fut distrait et attiré par le grondement d’un tam-tam… il se rendit à l’endroit d’où provenait la musique et les acclamations. Caché et observant les festivités, il fut découvert par les génies qui lui transmirent la danse et le mirent en garde : chaque année, à la même période, son peuple devait célébrer cette fête au risque de voir un grand malheur s’abattre sur la communauté. C’est ainsi que la fête fut transmise aux hommes par les génies et que depuis, les N’zima la célèbre.

Il s’agit de la célébration de la nouvelle année pour les Nzima, durant laquelle, tous les Nzima « rentrent en famille » afin de passer du temps ensemble et se souhaiter les meilleurs vœux pour l’année à venir.

L’Abissa s’étend sur deux semaines, diamétralement opposées par leurs atmosphères et les actions qui s’y déroulent. La première, appelée ‘Siédou’ est considérée comme la semaine silencieuse; la seconde ‘Gouazo’ est celle des effusions, des festivités.

Le siédou  

Le siédou démarre un dimanche en fin d’après-midi. Cette année, c’était le 19 octobre. La famille Nvavilé, détentrice de l’Abissa et gardienne du tam-tam sacré, l’Edongbolé, ‘prépare’ ce dernier, en le nettoyant, le séchant, le décorant. Puis, après libation, il est prêt à sortir de la maison dans laquelle il est conservé pour rejoindre la place de l’Abissa.

J’étais moi-même sur la place de l’Abissa, avec quelques amis, lorsqu’il est arrivé. Nous attendions depuis un peu plus d’une heure; heure durant laquelle nous ne nous sommes pas ennuyés car il y avait beaucoup d’agitation aux alentours. De nombreux jeunes déguisés, des enfants qui s’enduisaient le visage et le corps de kaolin… des altercations aussi. Bref, nous étions absorbés par ce qui se passait autour de nous, du coup nous n’avions même pas réalisés que le tam-tam était là, jusqu’à ce que les initiés commencent à le faire gronder.







Il y a eu alors comme une radiation, toute les personnes se sont tournées vers lui et se sont mises à danser. C’était vraiment impressionnant! Le tam-tam est resté sur la place quelques minutes, puis il a commencé à être transporté à travers le village. Une importante procession l’accompagnait.



C’est à ce moment-là que j’ai vu pour la première fois un des pas de l’Abissa, le plus vigoureux, celui qu’on l’on désigne comme le pas des jeunes… En effet un groupe de jeunes, déchaînés s’est mis à l’effectuer juste sous nos yeux. Nous étions au bon endroit, au bon moment!
Et puis le tam-tam a continué sa course… pour retourner dans sa maison, toujours suivi de nombreuses personnes, de tous âges!




À l’époque, il était envoyé en brousse, dans le Bouakè, le bois sacré...
Durant toute la semaine, les habitants du village sont priés de rester silencieux ou du moins le plus calme possible. C’est une semaine de méditation avant le début des véritables festivités!



La fin de la cérémonie marque le début de la semaine considérée comme silencieuse, durant laquelle le peuple doit méditer. C'est l'occasion de faire une instrospection, penser aux bonnes et mauvaises actions de l'année écoulée, afin de commencer celle qui arrive sur de meilleures bases.

 Le Gouazo 

C’est la semaine qui m’a donné le vertige et déboussolée!!  Je n’avais jamais vu autant de monde à Grand-Bassam! J’irai même jusqu’à dire que j’ai eu du mal à m’y faire. Il m’a fallu quelques jours d’adaptation. Les premiers jours, dès que les danses se terminaient, je me précipitais chez moi… tandis qu’au terme de la semaine, j’avais le courage de me balader après les danses pour ‘assister’ à l’euphorie. Mais l’Abissa a eu raison de moi car le dernier jour, je suis tombée très malade ! Bref… revenons à nos moutons!

Le Gouazo, vous l’aurez compris, est la partie ou les festivités commencent réellement et durant laquelle on observe une affluence record à Grand-Bassam!




Elle a commencé une semaine après le Siédou, un dimanche après-midi. Le tam-tam après sa semaine de ‘retraite’, est sortie de sa ‘maison’ pour se diriger vers le Palais Royal où  le roi l’attendait pour effectuer des libations. Le tam-tam est donné au roi afin qu’il ‘transmette’ l’Abissa au peuple. Ainsi, après les libations on dit à Grand-Bassam que l’Abissa appartient au peuple ce qui signifie que pendant une semaine, l’autorité, la crainte du roi et de représailles éventuelles s’efface au profit de la liberté d’expression. C’est la semaine ou tout est permis ou tout le monde serait sur le même pied d’égalité. En effet, comme les personnes présentes ont pu le constater ce jour-là, dans le Palais Royal, le roi, entouré de sa famille et son porte-canne, était assis sur une simple chaise. C’est ce qui m’a frappé dès que je suis rentrée dans la pièce. En regardant le roi je me suis dit : tiens, il manque quelque chose! Effectivement, c’est un peu plus tard, en parcourant les photos que j’ai réalisé ce qu’il manquait!




                                          Le tam-tam se dirige vers le Palais Royal

                                       Il y avait du monde, beaucoup de monde…


Les instrumentistes sont tous habillés de la même façon (au centre). La photo ci-dessus me fait beaucoup rigoler parce qu'il s'avère que l'un d'entre eux est notre chauffeur. Pendant plusieurs jours, il avait "disparu", prétextant une maladie...
Et lorsque j'ai pris cette photo; je ne m'étais pas rendue compte qu'il y était...
C'est le troisième jour que nous nous sommes rendu compte ma mère et moi qu'il était parmi les instrumentistes. Nous regardions les danses et elle s'est écriée :
 "-Affoh ! Regarde sur le podium là-bas!! Tu vois qui je vois ? Tu le reconnais ? C'est ...."
Nous étions surprises et rigolions en nous disant " On l'a attrapé !! On va le lui dire à la fin de l'Abissa quand il se sera soudainement remis de sa "maladie"!

Mais ma mère ne s'est pas fâchée...
De toutes les façons, chez les N'zima, on a pas le droit de se fâcher durant l'Abissa. D'ailleurs si l'on s'est querellé avec quelqu'un durant l'année écoulée et que l'on ne parle plus à cette personne; lorsqu'à cette période cette dernière vient s'excuser; vous devez lui pardonner!

Et je dois avouer que je me suis moi-même surprise à me réconcilier avec une personne qui m'avait énervée après une interview et que je feignais de ne pas voir lorsque nous nous croisions !! (rires)

Ma personne ressource qui vit dans le village N'Zima s'est également réconciliée avec deux personnes à qui elle n'adressait plus la parole.




Le roi a remis le tam-tam au peuple et tout le monde s’est dirigé vers la place de l’Abissa tandis que lui, est reparti. Il ne se montre que les mardi et samedi, appelés ‘ jours de la sortie du roi’.

Voici quelques photos de cette semaine de festivité 

Dimanche, jour 1 

Journée de sortie de l'Edongbolé qui est remis au roi; afin qu'il le remette au peuple.
 Au calme de la semaine précédente succédera une semaine d'euphorie au son du tam-tam qui 'parlera' tous les jours! Les festivités peuvent commencer !







Ce monsieur (photo ci-dessus) animera chaque journée. Il est affectueusement appelé Edongbolé , comme le tam-tam par les Nzima; car aidé de son micro; c'est ce dernier qui, en langue Nzima commandera au tam-tam d'accélérer ou de diminuer la cadence!
Ses expressions, toujours les mêmes d'ailleurs, résonnent encore dans ma tête!!
L'Abissa ne serait pas pareil sans lui !!



Hommes déguisées en femme et imitant leur démarche




Au centre, un autre homme déguisé en femme! Il a longuement dansé!


Lundi, jour 2

C'était la journée des jeunes qui ont eu droit à une conférence le matin et des danses l'après-midi.

Le matin, le premier invité était le Pr Joachim Agrbroffi, anthroposociologue qui a longuement parlé de l'Abissa qui a fait l'objet de thèse d' Etat en 1997.
Ensuite, Monsieur Louis Kouamé Abrima, auteur de trois livres sur le peuple Nzima : Adjapadjei, histoire du peuplement Nzima et religion traditionnelle Nzima; a pris la parole






Elzo, le chef des jeunes et le Pr Agbroffi




Mr Louis Kouamé Abrima le second invité



Le public n'était pas aussi nombreux qu'espéré, Le Palais Royal avait été apprêté pour l'occasion.





toutefois, de perspicaces jeunes et notables ont posé des questions pertinentes qui ont poussé les invités a donner de plus amples informations et précisions pendant la période des questions.




L'après-midi :




Instumentistes sur l'estrade au centre de la Place de l'Abissa




Un groupe de danseuse





Mardi, jour 3 :

C'était le jour de la première sortie du roi et le jour de la famille Nvavilé, détentrice de l'Abissa, qui a défilée avec ses attributs. Les Komlin ou nissili, les prêtresses-guérisseuses ont également défilé ce jour-là ! C'était aussi le début de ce que l'on appelle ' la critique sociale' qui fait la particularité du peuple Nzima et de l'Abissa.





Avec ma mère, avec le pagne de l'Abissa 2014.
Cette année; le nouveau pagne était couleur 'or', pour mettre en avant la septième famille N'Zima, les Mafole. L'année prochaine; grâce à une couleur différente, une autre famille sera célébrée.



Les guerriers du roi préparent la tribune officielle; le siège du roi.




La femme du roi; qui n'est PAS la Reine-mère est à la droite du siège.




Arrivée de la famille Nvavilé et ses symboles : le maïs et la pirogue associée à la 'naissance' de leur famille.




Derrière, on aperçoit le grand parasol blanc qui protège le roi du soleil




Arrivé du roi devant la tribune officielle



On l'entoure pour empêcher le  peuple de le voir descendre de son siège porté




Les invités sont priés de se lever pour l'accueillir. On voit tous les notables sur la gauche.






Le roi est installé, les danses peuvent commencer! 




Les femmes Nvavilé du village Nzima du Quartier France de Grand-Bassam dansent




Les symboles de la famille Nvavilé



Les komlins ou nissili ou prêtresses guérisseuses dansent à leur tour




Mr 'Edongbolé' en action

Groupe des femmes Nzima de Yopougon




Groupe des femmes du village d'Azuretti

Divers groupes de danse :





Installation du premier groupe de chansonnier. Le groupe Ablamon du village Nzima du Quartier France de Grand-Bassam





Ce groupe a fait beaucoup jaser dans les tribunes en raison des critiques adressées à certains chefs de village. L'un d'entre eux étaient présent. Il souriait lorsque les chansonniers se sont mis à le critiquer. Etant donné que durant l'Abissa nul n'a le droit de sa fâcher et comme les N'zima disent " les chansonniers bénéficient de l'immunité critique et sont sous la protection du roi"; les critiques fusent et les chansonniers ne risquent aucunes représailles ni de la part des notables , ni de la part du roi lui-même s'il fait l'objet de critiques.

Les critiques sont faites en Nzima, à l'aide de paraboles, qui seraient difficiles à comprendre, même pour certains Nzima à l'esprit peu affûté. Inutile donc de vous dire que je n'y comprenais absolument rien! J'ai donc demandé aux personnes assises à côté de moi si elle pouvait m'expliquer ce qui se passait !

Il y a eu beaucoup d'agitation dans les tribunes...



On peut apercevoir la femme du roi et la Reine-mère (en bleue), qui est la cousine du roi.

Les critiques recommencent :






Les Ananzè, le second groupe de chansonnier; qui venait d'Azuretti...
Au style différent du groupe précédent... qui a aussi réussi à agiter les spectateurs Nzima hors des tribunes!



Mercredi, jour 4 :




Ce jour-là était dédié aux femmes. Toutefois, a tort ou a raison, j'ai préféré aller assister à la cérémonie officielle du lancement des travaux de la ville historique de Grand-Bassam bien qu'au fond de moi je sois certaine que malgré cette cérémonie; la réhabilitation effective ne risque pas de démarrer de si tôt et ce, pour de nombreuses raisons!

Il y avait du beau monde! Des notables Nzima, des notables des communautés ethniques de Grand-Bassam, le roi des Nzima kôtôkô, le Premier ministre, le ministre de la culture et j'en passe...
Mais quel ne fut ma surprise de constater que tous les 'ambassadeurs de la Ville Historique' soient présent dont Monsieur Bernard Blinlin Dadié!










Notables Nzima de Grand-Bassam et d'Azuretti










Les danseuses de Kété












Le roi des Nzima Kôtôkô











Bernard Blinlin Dadié en vert au centre

Lorsque tous les ambassadeurs de la Ville Historique ont été appelés au centre, je pense que personne ne s'attendait à ce que Mr Dadié se lève également et soit en si grande forme. Le maître de cérémonie avait précisé, en mentionnant son nom, qu'il serait "centenaire dans deux ans" alors lorsqu'il s'est levé tout seul et s'est dirigé vers le groupe on a pu entendre des murmures s'élever "mais c'est incroyable ça! Regardez-le" ou encore des " c'est formidable"!
Et comme de nombreuses personnes, je me suis levée seulement à ce moment de la cérémonie, pour immortaliser l'instant!



Jeudi, jour 5

Cette journée était intitulée " journée des forces vive du peuple N'zima : la valeur d'ouverture aux autres peuples, gage de développement économique."
C'était également la journée de la famille Azanhoulé qui a défilé avec ses symboles.
C'est également la journée durant laquelle il y a eu un 'petit incident'. Je dois avouer que j'étais moi-même un peu confuse!







Le moment d'incompréhension :




Alors ce moment a créé un petit malaise parmi certaines personnes, notamment un groupe venu avec des enfants! Ils étaient assis dans les tribunes située sur la gauche de la place de l'Abissa. Lorsque cette femme a commencé à tenir le sexe en bois qu'elle avait autour de la taille, d'autres femmes autour; se sont approchées d'elle et se sont mises; chacune à leur tour à simuler un acte sexuel...
En l'espace d'une minute, ce groupe de personne est parti, emportant rapidement leurs enfants avec eux!



                                        Arrivée du chef d'Azuretti et quelques notables





Arrivée de la famille Azanhoulé et ses symboles







Les chansonniers pour la 'critique sociale'


Quelques déguisements : 







Vendredi, jour 6 :

C'était la journée des chefs de village avec notamment les présence des chefs N'zima qui ont fait allégeance au roi.
C'était également la journée de la famille Allohomba et celle des Adahonlin.
Lorsque les Allohomba sont arrivés avec leurs attributs, la maitresse de cérémonie disait dans le micro "Ce sont les blancs des Nzima" et je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire!
En ce qui concerne la famille Adahonlin, leur représentant le plus célèbre serait le cinéaste Gnoan Mballa qui est aussi le premier conseiller du roi. Il était présent avec sa famille lors des trois tours de danse effectués sur la place de l'Abissa.







La famille Allohomba défile avec ses symboles




Femmes Allohomba au postérieur rembouré

La famille Adahonlin :





Quelques déguisements : 









Samedi, jour 7 :

C'était la journée de la deuxième sortie du roi ou "l'apothéose"! 
Voici les seules images que j'ai pu capturer de cette journée; étant trop malade pour assister aux différentes cérémonies de la matinée et danses du soir!
J'ai également manqué la fanfare du dimanche matin et la présentation des voeux du roi au peuple!






Le roi se rendant sur la place de l'Abissa 








Le déguisement 

En plus de la 'critique sociale', une des particularités de la fête; qui la distingue des danses traditionnelles que l’on retrouve sur l’ensemble du territoire ivoirien est le déguisement. À l’Abissa, les N'zima se déguisent, les visiteurs également… Ceci lui vaut souvent d’être qualifié de carnaval, ce qui déplait fortement au N'zima. Ils insistent sur le fait qu’il s’agit plutôt d’une danse traditionnelle, en aucun cas, d’un carnaval. Toutefois, le déguisement y tient une place importante. En effet, c’est le moment pour la population de laisser libre-cours à son imagination et de faire passer certains messages.

L’une des personnes qui m’a le plus marqué est très certainement ‘Le ministre des affaires bizarres’, que je n’ai malheureusement pas pu capturer en raison de la difficulté de pouvoir l’aborder, comme un véritable ministre semblerait-t-il. Il déambulait dans les rues du quartier France, à vive allure, une valise à la main sur laquelle on pouvait lire ‘ministre des affaires bizarres’. Certains jours c’était : ministre de la défense!  Impossible également de lui parler : téléphone à l’oreille, on l’entendait crier ‘Oui Monsieur le Président! J’arrive Monsieur le Président ! Un montant de quatorze milliards ?! D’accord Monsieur le Président!’… Il était complètement dans son rôle.

La tendance de déguisement que l’on voyait le plus fréquemment étaient celle d'hommes déguisés en femme… Je n’ai vu que quelques rares femmes, déguisées en homme. Pour cela, elles s’accrochaient un sexe en bois autour de la taille.

Toutefois, il semblerait que certaines personnes se déguisent vraiment pour rigoler, sans avoir de véritables messages à faire passer. Comme ce jeune homme… oups ou plutôt cette jeune femme un peu rigide, en mini-jupe, très velue et un peu maladroite sur ses talons à qui j’ai demandé :

"- Pourquoi tu te déguises en fait ?
- Juste comme ça ! Parce que ça me plait!
- Mais pourquoi en femme ? Tu veux dire quelque chose ?
- Non comme ça! Parce que ça me plait…

-Heu…. Ok ! Amuses toi bien !"

Le Quartier France de Grand-Bassam à l'heure de l'Abissa

Au-delà du nombre de personne qui déferle sur la ville à cette occasion, des hôtels qui affichent complet, surtout lors du deuxième week-end, des couples qui… se font sur la plage et se défont juste après l’Abissa; ce qui m’a aussi frappé est que la ville se transforme pratiquement en maquis à ciel ouvert. Il y en a littéralement partout !! Aussi bien devant les maisons, dans les rues ou les  espaces entre les cours familiales ou encore… dans de vieux bâtiments complètement délabrés qui d’habitude sont désertés voire inutilisés! Il y a le village gastronomique par ici, le village solibra par-là… et puis la ville est aux couleurs de ses différents sponsors…







C’est le moment où les habitants qui ont de la place devant ou même à l’intérieur de chez eux, louent leur espace afin de profiter un peu des retombées de l’évènement.
C’est également l’occasion pour des vendeurs mais surtout de courageuses vendeuses qui viennent parfois de Bonoua, d’Aboisso ou encore d’Abidjan; de vendre des soupes de queue de bœuf, de poisson…

En résume, le Quartier France et le Village N'zima étaient tout simplement méconnaissables!!

L’euphorie de l’Abissa et tous les évènements qui s’y sont déroulés constitueront un souvenir intense de mon séjour ici.